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04 avril 2021
Crowdfunding : Un mode de financement au service de l’entreprenariat
Qu’est-ce que le crowdfunding ?
Le crowdfunding, ou financement participatif, est une innovation financière qui permet à des porteurs de projets (particuliers, entreprises, associations), principalement numériques, artistiques ou culturels, de lever des fonds directement auprès de particuliers via des plateformes sur internet.
Contrairement à la finance traditionnelle, la finance participative permet de mettre en relation directe le contributeur, qui appartient à une communauté particulière, avec le porteur du projet. Ce mécanisme offre donc des solutions permettant de collecter une multitude de petites contributions émanant d’individus qui peuvent être disséminés géographiquement, mais réunis autour d’une cause (agriculture, environnement, énergie renouvelable, etc.).
Aujourd’hui, le crowdfunding offre 3 principaux modes de financement : le don, l’investissement et le prêt qui présentent chacun un modèle économique différent.
Le crowdfunding en don ou crowdgiving
Le financement des projets se fait via des donations sans attente d’un retour financier. En effet, la rémunération dans ce cas n’est pas d’ordre financière mais sous forme de récompenses. Le donateur peut ainsi recevoir, selon les projets, un cadeau de la part du porteur de projet ou un exemplaire à un prix préférentiel du produit qu’il précommande.
Le crowdgiving concerne principalement des projets solidaires et citoyens, artistiques (peinture, photographie, théâtre, etc.), créatifs (musique, mode, design, etc.), technologiques, de Recherche, etc.
Pendant la campagne de crowdfunding en don, la plateforme assure une gestion analytique des flux dans des porte-monnaies électroniques. Les fonds sont déposés auprès d’une Banque dans un compte bancaire séparé et dédié aux projets.
Les conditions nécessaires pour transférer les fonds collectés vers le compte bancaire du porteur sont les suivantes :
- Atteinte des objectifs de la levée de fonds (objectif, durée, règle, etc.) ;
- Validation du dossier du porteur de projet en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.
Les plateformes de crowdfunding se rémunèrent, dans ce cas, via une commission sur les fonds collectés au profit des projets. Celle-ci est comprise entre 0,7% et 6,1% selon la nature du projet.
Le crowdfunding en investissement ou crowdinvesting
Le crowdinvesting permet à des investisseurs de se regrouper via une plateforme internet pour prendre des parts dans le capital d’une entreprise (une start-up ou une PME). La rémunération se fait sous forme de dividendes et est proportionnelle à l’investissement.
Chaque membre de la plateforme, investisseur ou porteur de projet, possède un porte-monnaie électronique dédié qui lui permet d’interagir (investir, recevoir des fonds, etc.) avec les autres membres de la plateforme dans le cadre des opérations autorisées dans la plateforme de crowdfunding.
Les plateformes de crowdfunding se rémunèrent, dans ce cas, via une commission sur les fonds collectés au profit des projets. Celle-ci est comprise entre 6,8% et 9% selon la nature du projet.
Le crowdfunding par prêt ou crowdlending
Le crowdfunding par prêt permet à des particuliers et à des institutionnels de prêter directement à des entreprises ou à des particuliers. La rémunération de l’investisseur se compose du remboursement du prêt, majoré d’intérêts.
Les plateformes de crowdfunding se rémunèrent, dans ce cas, via une commission de 4% sur les montants levés appliquée au porteur de projet.
Avantages pour l’investisseur
| Donner du sens à ses placements financiers
Le crowdfunding est un investissement qui permet d’allouer directement son épargne au financement de l’économie et à la création d’emplois. L’investisseur est libre d’investir ou non, il peut choisir sa ou ses plateformes de financement participatif et les projets dans lesquels il souhaite investir, ce qui lui permet de gérer de façon active son investissement.
| Donner son avis sur un projet de financement participatif
Le crowdfunding s’inscrit dans un contexte plus global d’essor de l’économie collaborative. Sur une plateforme, l’investisseur peut partager son avis sur un projet et consulter celui des autres investisseurs. L’investisseur a donc le pouvoir d’influer sur le succès ou l’échec d’une opération de collecte de fonds.
| Diversifier son Épargne avec des taux de rentabilité non négligeables
Le financement participatif offre des taux de rendement attrayants (entre 3% et 12% brut par an en France), bien plus élevés que les placements classiques, incitant ainsi les particuliers à choisir le crowdfunding comme moyen d’investissement.
Inconvénients
| Un choix d’investissement réduit
En étant inscrit sur une seule plateforme de crowdfunding, un investisseur peut être confronté à un choix d’opportunités assez limité de 2 ou 3 opérations à l’instant T ; il se peut aussi qu’aucune levée de fonds ne soit proposée.
| Des performances aléatoires
L’investissement participatif est par nature aléatoire. En effet, le souscripteur n’a pas la garantie de récupérer sa mise. Si l’objectif est bel et bien de réaliser des plus-values importantes, l’investissement dans des jeunes PME et des start-up peut engendrer des moins-values conséquentes en raison de la faillite des sociétés financées, plus fréquentes lors des trois premières années de vie d’une entreprise.
Notons qu’à fin janvier 2020, le taux de défaut moyen des principales plateformes de crowdlending se situe à près de 10%.
Crowdfunding
Un marché en croissance exponentielle à l’échelle mondiale
Le crowdfunding a été lancé dans les années 2000 avec des initiatives individuelles souvent portées par des créateurs ou par les porteurs de projets eux-mêmes plutôt que par des plateformes.
Le concept a réellement été lancé en 2003 suite à la création du 1er site de financement participatif, ARTISTSHARE, également label de musique. C’est en effet dans le domaine culturel que le crowdfunding s’est d’abord développé.
L’année 2005 a été marquée par l’apparition d’un nouveau type de plateforme avec la naissance d’EQUITYNET, permettant à des start-ups et à des entreprises de lever du capital auprès des investisseurs.
Le marché du crowdfunding a pris son envol après la crise américaine des subprimes à l’automne 2008.
Les établissements financiers américains ayant perdu l’équivalent d’USD 90 Md, les conditions d’accès au prêt et à l’investissement se sont considérablement durcies. Les années 2008 et 2009 ont ainsi vu la création de nombreuses plateformes de crowdfunding, dont INDIEGOGO et KICKSTARTER, permettant aux entrepreneurs, start-ups et petites entreprises de lever des fonds plus facilement.
Crowdfunding
Lancement imminent au Maroc
Mise en place en cours d’un cadre réglementaire
Attendu depuis avril 2018, le projet de loi n°15-18 relatif au financement collaboratif a été adopté le 11/02/20 par la Chambre des représentants. Ce dernier a pour but de définir le cadre juridique de l’exercice par les Sociétés de Financement Collaboratif –SFC- et des différentes formes de financement collaboratif. Dans ce sens, il établit un dispositif complet de régulation de ces activités comprenant notamment :
- La création du statut de gestionnaire de Plateformes de Financement Collaboratif -PFC- ;
- La définition du dispositif d’agrément des SFC et de supervision des activités de financement collaboratif ;
- La définition des procédures et des modalités de création et de fonctionnement des PFC ;
- La définition des engagements et des obligations de la SFC notamment, en matière d’information du public, de publicité et de reporting ;
- La définition des règles à respecter en matière de vérification préalable des projets à financer, de sécurisation des transferts et de protection des contributeurs ;
- L’établissement de plafonds en termes de montants à lever par projet et par contributeurs pour les différentes formes de financement ;
- La définition de règles spécifiques à chacune des trois formes de financement collaboratif, dont le plafond ne peut dépasser M MAD 10, à savoir :
• Le financement des projets sous forme de prêt, pour lequel BANK AL MAGHRIB encadrera le taux d’intérêt ou encore les durées maximales de l’emprunt ;
• Le financement des projets sous forme de don, où le donateur devra obtenir une autorisation si le montant dépasse MAD 500 000 ;
• Le crowdequity, où les sociétés gestionnaires qui veulent proposer l’investissement en capital devront obtenir un Visa auprès de l’Autorité marocaine du marché des capitaux –AMMC-.
À noter que Les plateformes doivent avoir un capital minimum de MAD 300 000 et les sociétés de financement collaboratif qui vont les gérer doivent avoir une politique de prévention et de réduction des risques.
Un moyen de renforcer l’inclusion financière au Maroc
La mise en place d’un cadre juridique à travers la Loi n°15-18 régissant les activités de financement collaboratif s’inscrit dans le cadre des efforts des Pouvoirs Publics visant à renforcer l’inclusion financière des jeunes porteurs de projets, pour l’appui au développement économique et social et pour la canalisation de l’épargne collective vers de nouvelles opportunités.
Le crowdfunding vient ainsi compléter le financement bancaire, notamment le Programme intégré de financement des entreprises. En effet, celui-ci s’adresse également aux petites entreprises et vise à offrir une nouvelle génération de produits de garantie et de financement à destination des TPE, des jeunes porteurs de projet, du monde rural, du secteur informel et des entreprises exportatrices. L’objectif étant de lancer une nouvelle dynamique de rupture à même d’encourager l’entrepreneuriat afin de favoriser l’insertion socioéconomique des jeunes, notamment dans le monde rural.
Un potentiel de croissance important au Maroc…
L’écosystème financier marocain gagnerait à diversifier ses offres de financements afin de combler la faiblesse du taux de bancarisation de certains opérateurs économiques. En effet, le crowdfunding pourrait constituer une réponse pour améliorer l’accessibilité des TPME aux sources de financement sur l’ensemble du territoire grâce à la dématérialisation du modèle.
Ce dernier, par une mutualisation des risques par les investisseurs, pourrait répondre aux besoins de financements des acteurs en marge du système traditionnel.
… Pouvant, toutefois, être freiné par certains facteurs
Le risque lié à l’utilisation d’internet pour la collecte des fonds constitue l’une des principales contraintes au développement de ce mode de financement au Maroc.
En effet, les donateurs sont généralement méfiants quant à l’identité des entrepreneurs porteurs de projet et des plateformes intermédiaires, vu l’amplification des cas de fraudes sur internet. Ainsi, il pourrait être difficile d’établir un climat de confiance entre les différentes parties.
Ceci étant, l’intérêt porté aujourd’hui aux TPME marocaines serait de nature à favoriser le développement du crowdfunding au sein du Royaume, notamment pour les jeunes porteurs de projets novateurs.